NOS CONDITIONS D’EXISTENCE Manifeste des courants faibles

« L’invisible est vital

Les artistes invisibles en sont le foyer brillant.

Le cœur obscur de l’art contemporain C’est l’oligopole.

L’oligopole est le lieu du pouvoir de l’art :
Une avant-garde dévoyée, une cage
Un laboratoire, un modulateur de tendance.
Son emprise économique lui permet d’imposer, de dominer Voire de corrompre.

Son dispositif extractiviste vampirise la culture esthétique.

Le but est d’établir une certaine valeur de l’art :
Les gouverneurs de l’art repèrent et sélectionnent
Extraient des idées et délimitent des formes pour servir leurs intérêts.

Mais c’est de nous qu’ils se nourrissent
Même si parfois nous croyons aussi nous en nourrir.

Nous n’avons nul besoin d’oligopole
De mégacentres d’art, de fondations, de prix. Nous pouvons rompre nos liens avec cet ordre. »

Cabaret courant faible

Avec l’anti-CV, nous souhaitions réfléchir aux conditions d’existence des artistes : si le CV masque la réalité de la vie au lieu d’en être la description, en quoi consiste-t-elles ces vies ? Par ailleurs, on peut aussi poser des conditions d’existence et non seulement qui les subir. Quand nous avons initié le Cabaret courant faible, nous pensions à cela : créer un espace, intermittent, mais dans lequel nous déciderions majoritairement de nos manières d’apparaître comme artistes. À un moment où sans doute, Élise Vandewalle et moi, nous sentions la fragilité de notre condition, nous avons éprouvé la nécessité d’inventer des moyens pour faire perdurer cette existence artistique sans avoir à trop dépendre de financements et d’institutions. Et aussi pour manifester la présence d’une communauté d’amis. Le manifeste prend pour point de départ ce geste. Il cherche également à le lier à cette notion de courants faibles. Notre existence se situe à la marge de « l’oligopole » de l’art, un centre de l’industrie culturelle « art contemporain ». Nous ne pouvons rien pour mettre à bas cette forteresse dans les jours prochains. Pour autant, nous ne sommes nullement sans pouvoir, nous vivons cette dialectique d’être des courants faibles. Nous ne sommes pas dominants mais notre action peut être déterminante.

Le Manifeste des courants faibles a été édité sous la forme d’un disque vinyle accompagné d’un livret. Il a été présenté lors de l’exposition Gewalt. https://gewaltdantai.com/fr/

« Gewalt est un mot allemand qui signifie « violence ». Dans les années 1960, face à la violence exercée par l’Etat japonais et sa police, la Nouvelle Gauche s’empare du syntagme : « GEBARUTO ». Elle entend ainsi désigner une anti-violence, réaction à la violence institutionnelle – celle au service des fins de l’Etat. L’anti-violence ne peut se départir de réflexions sur les moyens et la légitimité de la révolte, laquelle s’affirme comme le corollaire de toute résistance à la violence conservatrice du droit. »

Photo ci-dessus : Futoyu Masaharu